Le silence
Le silence est le vide comme il peut être plein. Il peut être réparateur comme il peut être assourdissant.
En ce moment, l’assemblée nationale, composée soi-disant d’une partie de l’élite de notre nation, évolue dans un brouhaha assourdissant quand on aimerait la voir travailler dans un silence respectueux. Les propos tenus par certains député(e)s, tous encartés aux extrêmes d’un coté comme de l’autre, sont proches de vide sidéral alors qu’un silence leur conférerait une forme de sagesse et de gravité devant la situation.
Le silence absolu n’existe pas. C’est comme le noir, il y a toujours une faible lueur imprimée sur notre rétine.
Il y a effectivement toujours un cliquetis, un battement, un souffle qui viennent caresser notre tympan. Et ce n’est pas toujours désagréable d’avoir un souffle chaud venir mourir en languissant dans le creux de l'oreille.
La recherche du silence que j’évoquais dans ma lettre aux français de métropole et d’outre tombe précédente, en chapitre 7, faisait davantage référence à la fuite devant les pollutions sonores. Les bons citadins savent de quoi je parle, entre la circulation automobile, les gens qui parlent fort, les sonneries en tout genre, les talons aiguilles, et jean passe et sa caravane aussi. Moi qui suis plus rural, pour pas dire rustique, j’entends à l’heure où j’écris ces vers un avion supersonique dans le ciel ( ce qui est normal, vous allez me dire, pour un avion), j’entends le ronronnement du frigo, je perçois le son d’une cloche au loin, sans parler du gargouillement de mon ventre qui digère la choucroute alsacienne que je viens de m’enfiler pour engranger des forces pour samedi.
Enfoui au fond de ma caverne, entouré d’un profond silence salvateur, je n’aurais plus ce genre de désagréments puisque les choucroutes ne sont pas admises dans les cavernes, article 49, alinéa 3.
Mais le silence au fond des bois, dans la caverne ou là-haut sur la montagne, les deux pieds les deux mains dans la merde, là-haut sur la montagne, y vivait un gros cul, y vivait un gros cul…, un gros curé d’campagne..
Veuillez m’excuser pour cette déconnexion impromptue, deux fils se sont malencontreusement touchés, me renvoyant en 1986, au fond du bus avec mes copains de rugby, en train d’entonner une chanson paillarde.
Je m’auto inflige un coup de tournevis et me voilà revenu à la réalité. Donc, dans le cas de l’ermite, le silence n’existe pas plus qu’ailleurs, sauf que le bruit des alentours n’est pas pollué et c’est là le point essentiel de ma démonstration. Pas de pot d’échappement souffreteux, pas de pimbêches braillant dans un téléphone dernier cri, ou d’aveugle criant dans un téléphone dernier braille, pas de sonnerie de micro-ondes, d’ascenseur, de radioréveil, pas d’écoulement provenant des toilettes.
Déféquer dans la nature est un geste militant contre la pollution sonore. Si tout le monde chiait dans la nature, nos oreilles s’en sentiront que mieux. Nos narines moins en revanche. On peut pas tout avoir.
Mais le silence fait peur, comme le noir. Quand on entend rien, quand on ne voit rien, alors, c’est l’imagination qui prend le relais avec son lot de fantasmes, de légendes, et la politique du pire.
Le silence de l’ermite, que ce soit moi ou Bernard ou même Thierry, est composé de multiples sons mélodieux au premier rang duquel participent les oiseaux. Le silence chanté par les oiseaux est une cure de réconfort, une reconnexion à notre base tantrique, même si je sais pas ce que cela veut dire.
Le bruit fatigue quand le silence répare.
Le silence effraie quand le bruit rassure.
Le bruit oriente quand le silence disperse.
Le silence apaise quand le bruit excite.